La Russie fournit un tiers du gaz naturel et du pétrole
[consommé par] l’Allemagne. Et leurs économies sont si imbriquées que
l’idée même de sanctions effraient les champions de l’exportation.
Sanktionen nein danke ! S’il est un patronat qui veut éviter
toute sanction économique contre Moscou, c’est bien l’allemand. Les
deux économies sont tellement imbriquées que Berlin aurait énormément à
perdre. Les échanges entre l’Allemagne et la Russie s’élèvent à près de
80 milliards d’euros (4 fois plus que la France).
L’hebdomadaire Wirtschaftswoche résumait cette semaine : “Plus
de 6.000 entreprises, de la multinationale aux PME, sont présentes en
Russie, où elles ont investi directement plus de 20 milliards. 300.000
emplois dépendent en Allemagne de ces échanges“. Berlin est le deuxième fournisseur de Moscou, après Pékin (la France, 8ème).
D’ailleurs jeudi 6 mars, alors que la crise ukrainienne battait son
plein et que le Kremlin ne semblait pas disposé à faire baisser la
tension, Sigmar Gabriel, ministre de l’économie et Vice chancelier est
allé à Moscou, en voyage officiel et a rencontré Poutine. Cette visite “prévue de longue date“, a-t-on précisé à Berlin, portait sur la “politique énergétique et de développement économique“.
Elle va tout à fait dans le sens de la diplomatie allemande : pas de
coup de menton, un pragmatisme qui respecte les intérêts bien compris de
chacun.
Des sanctions qui pourraient coûter cher
Car la Russie pourvoit aux besoins énergétiques de notre voisin :
elle lui fournit 31% de son gaz naturel (contre moins de 10% en France)
et 35 % du pétrole qu’elle consomme. En échange, l’Allemagne lui vend
des biens pour une valeur d’une quarantaine de milliards d’euros,
essentiellement des machines-outils, de la chimie et des automobiles.
Metro, Volkswagen, BMW ou Daimler sont des acteurs de poids.
Tout au long de la semaine, la presse Outre Rhin y est allée de ses
avertissements contre les sanctions, comparées par exemple à “un poison coulant dans le sang“, par le quotidien Süddeutsche Zeitung. “Chaque sanction a son prix“, mettait en garde le quotidien des affaires Handelsblatt, en écho à l’hebdomadaire Focus qui parlait de “spirale des sanctions“.
L’économiste star, Wener Sinn, patron de l’institut de Munich IFO,
estimait, quant à lui que les représailles économiques contre Moscou
mettraient en danger la transition énergétique allemande, qui rend le
pays “encore plus dépendant des importations russes“.
Schröder fait du [lobbying] pro-russe
Le 3 mars, l’ex chancelier Gerhard Schröder était à l’ambassade
d’Allemagne à Paris devant un parterre de politiques et d’hommes
d’affaires français. Soucieux de pacifier le débat, il a émis des doutes
sur l’utilité des armes économiques. “A quoi servirait d’appeler au boycott de la Russie, alors que l’on ignore qui va en pâtir le plus ?“, avait notamment déclaré ce proche de Poutine, qui appelle le patron du Kremlin son “ami” et qui l’a invité à la fête de ses 60 ans.
Il n’est pas le seul Allemand proche de Moscou. Plusieurs politiques
et hommes d’affaires de premier plan se sont reconvertis dans le
lobbying pour la puissance orientale. Dernier en date, Peter Löscher,
ancien président de Siemens qui vient tout juste d’être embauché par un
oligarque.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire